La localité de Dialafara, située dans la région de Sikasso, plus précisément dans le cercle de Kadiolo, à environ 15 kilomètres de la frontière avec la Côte d’Ivoire, se retrouve malgré elle au-devant de l’actualité virale. En effet, c’est ici, qu’un représentant de l’Etat qui navigue à contre-courant de la République a pris la décision de ressusciter les partis politiques dans sa circonscription.

Dans une lettre circulaire daté de ce 20 septembre, le Sous-préfet de l’Arrondissement de Dialafara, Mamadou Dembélé, invite ‘‘Mesdames, Messieurs les Chefs de partis politiques présents dans la Commune Rurale de Dialafara (à désigner leurs) représentants devant siéger au sein de la Commission administrative de révision ordinaire de la liste électorale au titre de l’année 2025’’.
Cette singulière requête de ce représentant de l’Etat à Dialafara se situe dans le cadre de la révision ordinaire de la liste électorale qui se tiendra du 1er octobre 2025 au 31 décembre 2025.
Pour cette opération électorale, le sous-préfet demande aux partis politiques de lui faire parvenir, au plus tard le 25 septembre 2025, la liste de leurs représentants titulaires et suppléants devant siéger au sein de la commission administrative. Il leur rappelle qu’il n’est désigné qu’un seul titulaire et suppléant par parti politique.
Contrairement à certains ministres ayant exercé dans ce pays, Mamadou Dembélé, Sous-préfet de l’Arrondissement de Dialafara, n’a pas été ramassé sur le boulevard à l’issue d’une manifestation de vendredi des tombeurs d’IBK.
C’est un éminent membre du corps préfectoral de notre pays.
Comme les autres, il a été nommé lors du conseil des ministres du 7 août 2024 à ce poste en vertu des articles 9 et 10 de l’Ordonnance n°2018-018/P-RM du 31 juillet 2018 portant statut du corps préfectoral ratifié par la Loi n°2019-028 du 24 juillet 2019 portant statut du corps préfectoral.
Selon ces dispositions, les Sous-préfets sont nommés par décret pris en Conseil des Ministres parmi les Administrateurs civils titularisés après un (1) an de service dans les services centraux, régionaux ou subrégionaux du ministère chargé de l’Administration territoriale, sauf en cas de nécessité. Dès leur nomination, ils accèdent au 3è grade.
Avant de prendre fonction, les membres du Corps préfectoral nommés dans les fonctions de Gouverneur, de Préfet et de Sous-préfets prêtent devant la juridiction compétente dont relève leur circonscription administrative, le serment suivant : « Je jure de remplir mes fonctions avec dévouement et probité et de me comporter, en tout lieu et en toute circonstance, en digne Représentant de l’Etat, de respecter et de faire respecter la Constitution et les lois de la République ». Ce serment n’est renouvelé qu’en cas de changement de fonction.
En invitant, au nom de l’Etat souverain du Mali, les Chefs de partis politiques présents dans la Commune Rurale de Dialafara à désigner leurs représentants devant siéger au sein de la Commission administrative de révision ordinaire de la liste électorale au titre de l’année 2025, le sous-préfet Mamadou Dembélé a-t-il exercé ses fonctions avec dévouement et probité et (s’est-il comporté) en digne Représentant de l’Etat, en respectant et en faisant respecter la Constitution et les lois de la République ?
Qui plus que lui se devrait de savoir, en tant que servir zélé de l’Etat, que le Mali souverain a par décret N°2025-0339/PT-RM du 13 mai 2025 dissout tous les partis politiques et les organisations à caractères politiques en République du Mali dont l’article 1e alinéa 1e est sans aucune équivoque : « Les partis politiques et les organisations à caractère politique sont dissouts sur toute l’étendue du territoire nationale ».
L’article 2 du décret interdit formellement à «toute personne de favoriser la réunion des membres d’un parti politique dissout, notamment en consentant l’usage d’un local dont elle dispose ou la mise à disposition de tout autre moyen à but politique».
Voici qu’un téméraire sous-préfet qui n’a cure de la légalité invite élégamment les partis politiques dissous de sa circonscription à venir siéger dans les commissions de révision des listes électorales.
Comme si Dialafara était sur la planète Mars et n’était pas une partie du pays soumise à la légalité du Mali ?
Quel est le calvaire et les risques auxquels la population de Dialafara pourrait être exposée si le premier responsable de l’Etat ne se retrouve pas quant à la légalité à mettre en œuvre de sa circonspection ?
Il ne connaît ni la loi, ni les décrets, comme un bon tirailleur, ‘‘il faut faire comme on a toujours fait, point à la ligne’’.
Sauf que le Mali a changé, il faut adapter le Larousse du village à ce changement. Nos localités ne peuvent survivre au moyen-âge judiciaire (Biton Tilé) et la République au 21e siècle.
Si la loi électorale N°2022-019 du 24 Juin 2022 dit que « les listes électorales font l’objet d’une révision annuelle du 1er octobre au 31 décembre de chaque année ».
Celle-ci n’est pas faite à l’aveuglette et suivant une mécanique coranique.
En cas de besoin, le ministre chargé de l’Administration territoriale peut prescrire la révision exceptionnelle des listes électorales dans les mêmes conditions que pour l’établissement de nouvelles listes électorales après un recensement administratif.
Mais pour Mamadou Dembélé, être un exemplaire sous-préfet, c’est appliquer la loi les yeux fermés.
La loi électorale dit que « la Commission administrative est composée d’un représentant de chaque parti politique présent dans la Commune, l’Ambassade ou le Consulat. Chaque représentant de parti politique est secondé par un suppléant qui le remplace en cas d’absence ou d’empêchement.
Les partis politiques sont invités par le Représentant de l’Etat dans l’Arrondissement ou dans le District, l’Ambassadeur ou le Consul, au plus tard quinze (15) jours avant le démarrage des opérations de révision, à désigner parmi les électeurs de la Commune, de l’Ambassade ou du Consulat, les noms de leurs représentants titulaires et suppléants.
Ces noms sont communiqués au Représentant de l’Etat dans l’Arrondissement ou dans le District, à l’Ambassadeur ou au Consul au plus tard sept (07) jours avant le démarrage des opérations de révision ». Point à la ligne.
Sauf que si le Représentant de l’Etat dans l’Arrondissement avait été l’exemplarité et le sacerdoce qu’exige sa fonction, il aurait dû savoir que la même loi dit que « Lorsqu’un parti politique ne procède pas à la désignation de ses représentants pour siéger à la Commission d’établissement et de révision, ce motif ne peut empêcher ladite commission d’effectuer les travaux de révision.
Dans ce cas, il appartient au président de dresser un procès-verbal de carence et de poursuivre la révision jusqu’à son terme ».
Dans ce cadre, pourquoi ne pas prendre en compte la dissolution légale des partis politiques et la conjuguer avec cette disposition ?
La carence de ce sous-préfet pose l’urgence de procéder à l’outillage des serviteurs de l’Etat, à tous les niveaux.
Car des sous-préfets genre Dembélé (Koumandan), ça existe partout.
Alors avant de jeter la pierre, qu’on s’assure d’abord qu’on est exempt des tares et à hauteur de mission de la République…

Par El Hadj Sambi TOURÉ

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