A la suite de Choguel Kokalla MAÏGA en septembre 2021, à New York, sur la scène solennelle des Nations-Unies, le Mali a trouvé depuis 2022 un orateur dont la voix résonne au-delà des murs de l’Assemblée générale. Trois fois, le général de division Abdoulaye MAÏGA est monté à la tribune, et trois fois, il a frappé, non pas avec des gants diplomatiques, mais avec la force de ses mots, l’acier de son verbe et l’éloquence d’une détermination inébranlable. Ces trois interventions forment ce que l’on pourrait appeler une véritable « trilogie du vitriol », où chaque discours est un acte, chaque phrase une mise au point, chaque image un avertissement à ceux qui doutent de la souveraineté de notre pays.
Premier acte : le feu du recadrage (24 septembre 2022)
Lors de la 77e session de l’Assemblée générale, Abdoulaye MAÏGA, Premier ministre par intérim, se présente pour la première fois à la tribune. Dès l’ouverture, le ton est donné. Le Secrétaire général de l’ONU, Antonio GUTERRES, reçoit son avertissement : il est un « simple fonctionnaire » dont le rôle ne doit pas empiéter sur la souveraineté des États. La critique est claire : les institutions internationales ne doivent pas dicter la conduite d’un État qui cherche à reconquérir son indépendance stratégique et militaire.
Puis, le regard du Premier ministre par intérim se tourne vers ses voisins et pairs africains. Mohamed BAZOUM, alors président du Niger, est désigné comme « étranger à la tête du Niger », une attaque frontale sur la légitimité de son leadership. Alassane OUATTARA, président de Côte d’Ivoire, se voit attribuer une image tout aussi tranchante : « Il se dribble lui-même tout en gardant le ballon », formule imagée dénonçant une diplomatie jugée opportuniste et centrée sur ses intérêts.
Enfin, l’Algérie, via son représentant permanent à l’ONU et son ministre des Affaires étrangères, reçoit l’un des coups les plus cinglants : « énergumènes diplomatiques ». Ces mots ne sont pas anodins ; ils traduisent un profond mécontentement face à ce que le Mali considère comme des interférences dans ses affaires internes.
Ce premier acte a un objectif clair : affirmer que le Mali ne se laissera pas guider ni intimider par des puissances étrangères ou des institutions internationales, et que sa souveraineté est non négociable. La scène de l’ONU, habituellement lieu de diplomatie feutrée, devient alors le théâtre d’une démonstration de force verbale.
Deuxième acte : la riposte consolidée (28 septembre 2024)
Deux ans plus tard, Abdoulaye MAÏGA revient à la tribune. Il n’est plus Premier ministre par intérim, mais toujours ministre d’État et vice-Premier ministre, ce qui renforce sa stature et son autorité. Cette fois, son discours se concentre sur les hypocrisies et les doubles standards des institutions internationales. Il dénonce l’ONU et d’autres acteurs comme étant partiaux dans la gestion des crises africaines, notamment dans la lutte contre le terrorisme.
L’Algérie reste une cible récurrente, accusée de jouer un rôle ambigu dans la crise malienne. Mais cette fois, la France et ses alliés occidentaux entrent dans son viseur : ils sont dénoncés pour leur « soutien camouflé » aux groupes armés terroristes (GAT), laissant entendre que certaines puissances prétendument partenaires jouent en réalité un rôle dans la déstabilisation régionale.
Ce deuxième acte montre un Mali plus confiant et plus offensif. L’objectif n’est plus seulement de recadrer, mais de riposter, de renverser le récit et de pointer les responsabilités des puissances étrangères. La posture d’Abdoulaye MAÏGA illustre un message clair : le Mali n’acceptera plus la tutelle ni le jugement partial des institutions internationales.
Troisième acte : l’orage souverain (26 septembre 2025)
Le troisième discours, prononcé lors de la 80ᵉ session de l’Assemblée générale, marque l’apogée de cette trilogie. Abdoulaye MAÏGA est désormais Premier ministre de plein exercice. Son ton est plus ferme, ses phrases plus tranchantes, ses avertissements plus explicites.
Il dénonce les adversaires internes qui seraient en collusion avec des acteurs extérieurs pour déstabiliser le pays. Puis ? il élargit son champ d’attaque aux promoteurs et sponsors du terrorisme, surnommés « auteurs du Yabé » accusés d’offrir des couloirs de passage aux GAT dans leurs territoires. Sa mise au point est limpide : « L’AES n’a pas peur, le Mali ne reculera pas », martèle-t-il, avant d’ajouter, comme une épée suspendue au-dessus de ceux qui menaceraient notre pays : « À chaque tir, le Mali répondra. »
Ce troisième acte symbolise la maturation d’une posture : celle d’un Mali souverain, qui impose ses règles et défend son territoire et son peuple sans faiblir. Chaque mot est calibré pour frapper et pour réaffirmer la détermination du pays.
Le général Abdoulaye MAÏGA, dans ces trois interventions, se révèle comme un tribun au style unique : direct, incisif et sans concession. Son langage tranche avec la diplomatie feutrée habituelle. Il pratique une forme de communication à la fois interne et externe : à l’extérieur, il avertit et recadre ; à l’intérieur, il rassure et galvanise. Le Mali n’est plus un État passif sur la scène internationale.
Cette trilogie du vitriol illustre une stratégie claire : faire comprendre que notre pays ne se laissera ni intimider ni subvertir, que la souveraineté est sacrée et que toute tentative de déstabilisation, qu’elle vienne de l’intérieur ou de l’extérieur, recevra une réponse ferme. Le ton, le style et le contenu de ces discours témoignent d’un moment crucial dans l’affirmation de la voix du Mali au monde.
PAR EL HADJ SAMBI TOURE