En célébrant le 65è anniversaire de l’indépendance du Mali, l’historien, Pr Bosco KONARE était l’invité du jour, ce lundi 22 septembre 2025, sur les antennes de l’ORTM, sous la modération de nos confrères Yaya KONATE et Bouréma KANE dit BK. L’invité du jour a rappelé un peu l’historique de la date de l’indépendance du Mali avant de conseiller que les équipements présentés lors du défilé, doivent être entretenus et remplacés par nous-mêmes.
L’histoire de l’indépendance du Mali, je commence par la journée du 28 septembre 1958, à Bamako, avec d’autres jeunes.
On nous a embarqué au bord du fleuve du Niger là où, il y a actuellement la Brigade de gendarmerie fluviale pour aller à Sikasso.
Sur la route, particulièrement à Bougouni, on est tombé sur la fête du referendum. Parce que, le référendum a été une véritable fête. Les gens étaient conditionnés ; ils savaient qu’un événement important allait se passer jouer le balafon…
Après, on a été à Nièna et à Sikasso. Sur toute la route, c’était la fête. Cet évènement m’a tout d’abord marqué. Après, il y a eu l’indépendance qui m’a trouvé à Sikasso où nous avons, nous-mêmes en tant qu’élève, participé à la fête pour défilé. Ce que je retiens de cette période-là, c’est que les gens étaient convaincus qu’on en est entré dans une autre phase.
Les Maliens et les soudais ont existé
L’importance de la date, d’abord, il ne faut pas laisser passer les choses avant elle. Les Maliens et les soudais ont existé. Donc, il faut rapprocher les choses.
Les Soudanais avaient un souvenir assez sobre de la colonisation.
Les gens oublient que de 1878 à 1940, les soudais ont opposé à la colonisation une résistance permanente. D’abord, une résistance armée où, pratiquement, toutes les villes ont été prises par la force.
Donc, quelque chose est resté dans la gorge des Soudanais. Après, les Soudanais refusaient ce que les blancs proposaient (l’école, les impôts, même la vaccination des animaux).
Je me souviens, étant au collège, j’ai passé quelques nuits en brousse avec les animaux pour ne pas que les vaccinateurs les vaccinent.
Parce qu’on était convaincu que la vaccination des animaux était un procédé pour faire un recensement de bétails pour augmenter les impôts.
L’indépendance restait quelque chose d’inachevé
Donc, on est resté dans des situations d’hostilité larvée de telle sorte que quand il y a eu l’indépendance, ceux qui avaient connu la période, c’était un ouf de soulagement.
Même si le procédé même de l’indépendance pour certains anciens restait quelque chose d’inachevé ; parce que, je me souviens que mon grand-oncle me disait ceci : « Mais vous avez dit que vous avez pris votre indépendance sans verser le sang ».
Donc, il y avait de la joie, mais aussi des interrogations. Parce que les anciens se demandaient que pour prendre les gens, il fallait un autre procédé que de taper les poings.
Le maître Joseph Ki Zerbo disait ceci : « L’indépendance africaine a été acquise à la faveur d’une complicité universelle ».
C’est-à-dire, au lendemain de la 2ème guerre mondiale, les plus grandes puissances étaient favorables à l’indépendance des pays colonisés ; notamment l’Union soviétique et les États unies. Ils faisaient la pression sur l’Angleterre et la France pour qu’il y ait l’indépendance. L’Angleterre a libéré ses colonies sans beaucoup de facétie. Parce que dans la pensée anglaise, une colonie est destinée à être libérée. Il disait qu’une colonie, c’est un fruit sur l’arbre. Quand le fruit est mûr, forcement vous le cueillez ou le fruit tombe.
Mais, les philosophies anglaise et française n’étaient pas les mêmes. Les français ont toujours mis dans la tête qu’il fallait y aller, tout en restant.
Donc, les français ont fait semblant de donner un emballage qui trompait, mais pour l’essentiel, ils sont restés.
C’est ça qui fait que nous sommes entrés dans cette affaire avec beaucoup de foi. Mais eux, ils avaient déjà fait leur calcul et leur planification.
L’essentiel dans les accords faisait que la France nous laissait avec l’administration locale, mais tout ce qui concerne la gestion internationale, elle veillait au grain par rapport à la monnaie, à l’armée et à beaucoup de choses.
Le Mali est allé en indépendance avec le Sénégal.
Donc, les accords de 1959 ménageaient un certain nombre de situations qui faisaient que nous étions accrochés à la France.
La renaissance du pays
On a vu beaucoup d’engins lors du défilé. Cela témoigne d’une renaissance du pays. Mais, ce que ça m’inspire aussi, c’est que ces outils doivent être entretenus.
Aussi, ces outils doivent être remplacés. De ce point de vue, nous ne pouvons pas nous contenter de prendre l’argent et d’en acheter.
Il est clair que dans l’optique des Assises nationales de la refondation, il était question que nous-mêmes, nous fassions l’effort intérieur d’en fabriquer.
Ce qui va supposer que nos établissements de formation soient outillés, intellectuellement, pour être orientés vers ce travail ; si bien au niveau du prytanée militaire, qu’au niveau de l’EMIA, des universités et facultés des sciences. Si nous ne sommes pas capables de remplacer ces outils par notre propre production, je crois qu’il y aura un problème.
Donc, la renaissance vers laquelle nous tendons, devra accorder une attention à cet aspect. C’est vrai que les projets sont en cours, mais il ne faut pas que les gens croient que la fabrication de ces outils par nous-mêmes est secondaire.
PAR SABA BALLO