Le Conseil national de transition (CNT) a adopté, ce lundi 20 février 2023, les textes de la nouvelle réorganisation administrative et territoriale de notre pays. L’adoption de ces lois consacre ainsi 19 régions plus le district de Bamako, 156 cercles, 466 arrondissements, 819 communes et 12712 villages, fractions et quartiers.
L’objectif de l’adoption de ces lois, selon le gouvernement, est de rapprocher l’administration à la population, de favoriser le développement local à la base, d’améliorer la gouvernance, mais aussi de prendre en compte l’Accord pour la paix et la réconciliation nationale issu du processus d’Alger.
Dans cette nouvelle configuration, il est prévu une collectivité unique dans le district de Bamako où les communes seront désormais des délégations du District dotées du statut juridique d’arrondissement.
Suivant ce statut, Bamako a actuellement 7 arrondissements avec la désignation de la sous-préfecture comme siège de l’arrondissement qui remplace les communes.
En termes clairs, l’appellation de commune pour désigner les circonscriptions administratives de la capitale va disparaître pour donner place celle d’Arrondissement.
En procédant ainsi à la subdivision de Bamako en arrondissement, le gouvernement entend harmoniser l’appellation des circonscriptions administratives sur l’ensemble du territoire national.
En effet, l’appellation d’Arrondissement est une terminologie héritée de la colonisation de même de celle de préfecture du Mali abandonnée il y belle lurette, tout gardant le mot préfet pour désigner le patron de l’administration du cercle.
De l’avis de certains observateurs, le recours à l’arrondissement pour désigner la circonscription administrative dans la capitale va à contre-courant de la réforme opérée par la police qui localise désormais son commissariat par le nom du quartier qui l’abrite.
Ceci procède du bon sens élémentaire dans la mesure où la multiplication des commissariats dans la ville de Bamako avait rendu difficile leur localisation par le terme arrondissement, y compris par les policiers eux-mêmes, a fortiori, le citoyen lambda.
En d’autres termes, Bamako découpé en arrondissements ne dit rien au mental du citadin ordinaire.
A cette allure, même les membres des familles fondatrice de Bamako eux-mêmes, vont sans doute s’y perdre avant de se familiariser avec leur nouvelle ville « connue inconnue » pour reprendre une formule célèbre de feu président Ahmed Sékou TOURE de la Guinée Conakry qui épilogue sur la complexité de l’homme.
Le recours à l’Arrondissement pour Bamako est également une grosse gifle pour le processus de refondation en cours de notre Eta (Mali Kura) tant prôné par les autorités de la transition dans la mesure où il contribue à perpétuer la domination psychologique de l’africain, incapable de repenser son espace vital en conformité avec son propre histoire, sa culture, bref son être profond.
Or, la notion d’Arrondissement ou de préfecture est un produit de la culture française, plus précisément une invention Bonapartiste.
Par exemple, Paris est découpée en Arrondissement suite au peuplement de la capitale en fonction des provinces d’origine, comme Paris de l’est avec les gens venus de l’est de la France; Paris de l’ouest avec les gens venus de l’ouest de la France, ainsi de suite.
C’est le même phénomène qu’on retrouve à Bamako où en général, on retrouve les gens venus de Kayes à N’tomikorobougou, N’Gnomiyirambougou, au Badian, etc. ; les gens venus du Mandé sont généralement logé dans les quartiers comme Sébénikoro, Djicoroni, etc. ; les gens venus de Sikasso et Bougouni habitent majoritairement à Faladiè, Sogoniko, Niamakoro, etc. ; les gens venus de Ségou sont nombreux à Magnambougou, Yirimadio, etc. ; les gens venus de Banamba et Koulikoro habitent, en général, à Boulkassoumbougou, Banconi, Djélibougou, etc.
De notre avis, l’ingéniosité ou l’inventivité en la matière, doivent nous pousser à puiser dans notre histoire et notre culture pour dénicher la terminologie qui nous parle.
Par exemple, on sait que dans notre culture, la plupart des ensembles se désigne par l’aire culturelle ou géographique comme le Banico, le Ouassoulou, Bélédougou, Kénédougou, le Songhaï, le Faguibiné(Lac noir en Soniké) actuel Fagibine, Wagadugu.
Sinon, les terminologies de Kafo, Sigida, Baco, Koulikoro, Fouga le gourma, sont courantes.
Alors, qui dit que le législateur malien ne pouvait pas mieux faire ?
Par Abdoulaye OUATTARA