Quatre jours afin de passer au peigne fin tous les sujets d’intérêts communs et régional et de raffermir la coopération entre les deux pays sous toutes ses coutures, telle était l’ambition de la visite de travail et d’amitié que le Premier ministre, le Dr Choguel Kokalla Maïga, a entrepris du jeudi 23 au dimanche 26 février 2023 à Ouagadougou. L’agenda du séjour, bien qu’à cheval sur le Fespaco, indiquait qu’il ne s’agissait pas pour le descendant de Soni et sa délégation d’une villégiature sur les terres de Moro Naba. De quoi a-t-il été question entre Maliens et Burkinabés, lors de ces journées historiques ? Bilan d’une visite fraternelle.

Le Premier ministre, Choguel Kokalla Maïga, a effectué du jeudi 23 au dimanche 26 février 2023 une visite de travail et d’amitié à Ouagadougou pour renforcer les liens de coopération entre nos deux pays. Il était à la tête d’une forte délégation comprenant plusieurs membres du gouvernement notamment : Ibrahim Ikassa MAIGA, ministre de la Refondation de l’Etat, Chargé des Relations avec les Institutions ; le Général Daoud Aly MOHAMMEDINE, ministre de la Sécurité et de la Protection Civile ; Mme DEMBELE Madina SISSOKO, ministre des Transports et des Infrastructures ; Lamine Seydou TRAORE, ministre des Mines, de l’Energie et de l’Eau ; Mme Diéminatou SANGARE, ministre de la Santé et du Développement Social ; Alhamdou AG ILYENE, ministre des Maliens Etablis à l’Extérieur et de l’Intégration Africaine ; Modibo KEITA, ministre du Développement Rural ; Andogoly GUINDO, ministre de l’Artisanat, de la Culture, de l’Industrie Hôtelière et du Tourisme.
À Ouaga, le Premier ministre est allé échanger avec les frères Burkinabés sur de nombreux sujets d’intérêts communs, notamment sur la question sécuritaire et d’intégration africaine, si chère au Mali. Lors de son séjour Ouagalais, il a été reçu en audience le vendredi 24 février par le Président de la Transition, Chef de l’Etat du Faso, le Capitaine Ibrahim Traoré, où il a transmis le message d’amitié, de fraternité et de coopération du Colonel Assimi GOÏTA, Président de la Transition du Mali. C’était en présence du Premier ministre du Burkina Faso, Apollinaire Joachim Kyélem de Tambela et de plusieurs membres des Gouvernements du Burkina Faso et du Mali.
A travers un Conseil Conjoint de Gouvernements, les deux Premiers Ministres se sont réjouis de la tenue effective de ce cadre de concertation bilatérale et ont souhaité qu’il soit institutionnalisé avec une périodicité de six mois pour sa tenue et de façon alternée. Retour sur les grandes lignes de la visite.

Terrorisme
La visite d’amitié et de travail intervenant au moment où l’armée du Faso paie le pire tribut au terrorisme, le Chef du gouvernement a tout d’abord présenté aux autorités et au peuple burkinabé, les condoléances du président de la Transition, le colonel Assimi Goïta, celles du Gouvernement et du Peuple malien.
Exprimant la compassion du peuple malien envers ses hôtes et partageant leur douleur, Choguel Kokalla Maïga les a appelés à l’union sacrée du Faso derrière leur armée et son commandant en chef : «ce qui vous arrive aujourd’hui, il faut tenir bon. C’est pour vous démoraliser, c’est pour que vous doutiez de votre armée. Personne ne viendra vous défendre à la place de votre armée. C’est une période difficile parce que vous avez fait aujourd’hui des choix qui ne sont pas du goût de tout le monde. On vous met la pression, on sème le doute. C’est en ce moment que le peuple burkinabè doit rester debout, uni et soutenir son armée et son président ».
Évoquant l’expérience de notre pays, le Premier ministre dira que «cette étape, nous l’avons traversée. A un moment au Mali, tous les jours, c’était des villages qui étaient rasés, des dizaines de morts par jour, des camps étaient attaqués. Nous savions très bien pourquoi cela se faisait. Les Maliens ont tenu bon et je vous dis de tenir bon. Les Burkinabè doivent faire de même ».
Se voulant d’un optimisme contagieux, Choguel Kokalla Maïga a rassuré que le terrorisme sera vaincu dans le Sahel par les armées des pays sahéliens avec le soutien des peuples et non avec des armées étrangères. « Nous sommes sûrs que le terrorisme sera vaincu au Sahel. Il sera vaincu parce que la guerre des Sahéliens est juste, elle ne peut pas ne pas réussir. Nous perdrons des étapes, des opérations mais nous allons gagner la guerre. Mais pour gagner la guerre, c’est avec nos armées. Aucune armée étrangère, personne ne viendra mourir pour nous. Les Africains doivent se défendre. Et cela, ils doivent avoir le soutien indéfectible de leurs peuples. C’est pour la liberté de tous parce que dès qu’il y a des attaques terroristes dans un pays, les autres pays voisins ne sont pas en paix ».
Dans le cadre de la lutte contre le terrorisme au Mali et au Burkina Faso et dans la bande sahélo-saharienne, les deux pays ont relevé la nécessité de conjuguer leurs efforts avec ceux des autres pays de la sous-région pour faire face à ce fléau et, appellent à une synergie d’actions au niveau régional pour l’endiguer.

Intégration
Les échanges entre Bamako et Ouagadougou au cours de cette visite d’amitié et de travail n’ont pas porté que sur les questions sécuritaires. Les deux pays avaient déjà évoqué le volet 31 janvier dernier, lors de la visite d’amitié et de travail à Bamako du Premier ministre Burkinabè Me Apollinaire Kyelem. En effet, les autorités des deux pays sont décidées à mutualiser les atouts et les potentialités face à un environnement inhospitalier afin de triompher ensemble contre les terroristes et d’amorcer le progrès pour le bonheur des populations. C’est dans ce cadre que le Premier ministre burkinabé avait émis l’idée d’une fédération des deux pays.
Oublié le conflit fratricide de décembre 1985, les deux pays les plus pauvres du monde se faisaient la guerre pour une bande de terre, place à la volonté des deux peuples de réaffirmer leur indépendance et leur souveraineté face à la junte française en poussant au summum leur coopération et leur intégration économique et politique. Si les héritiers de la Guinée de Sékou Touré étaient absents de la rencontre, l’idée d’une Afrique unie et solidaire a germé au cours de la visite de Choguel à Ouaga. Le narratif des officiels ne laisse aucune place quant à leurs ambitions fédéralistes. Jusqu’où vont-ils aller le Mali et le Burkina ?
Dans l’après-midi de ce 24 février 2023, le Premier ministre du Mali, Choguel Kokalla Maïga, et son hôte du Faso, Me Apollinaire Joachimson Kyelem de Tambèla, ont coprésidé, un conseil des ministres conjoint, une première dans l’histoire des deux pays. Qu’ont-ils abordé les ministres ? Selon le Premier ministre, Choguel Kokalla Maïga, le conseil des ministres conjoint avait à son ordre du jour «l’ensemble des questions qui intéressent nos deux peuples et nos deux Gouvernements en particulier la lutte contre le terrorisme, les questions humanitaires et les sanctions imposées par la CEDEAO aux trois pays en transition (Mali, Guinée et Burkina Faso). Nous avons donc conclu à la nécessité de tenir la grande Commission mixte Mali-Burkina à Bamako, dans les mois à venir, pour parler de toutes ces questions et notamment la problématique de la fédération sur laquelle nous avons indiqué que les peuples et les autorités supérieures sont en avance. Il faut donc aller au rythme des populations ».
Au-delà de ces questions ci-citées, le conseil a abordé les questions de développement. « En matière de coopération militaire, il nous a été dit ce que nos armées font ensemble. Nous avons décidé de ne plus être distraits, de nous consacrer à la contradiction principale, qui est de lutter pour la paix des populations, leur donner la sécurité physique, alimentaire, éducationnelle et sanitaire, parce que sans sécurité, il n’y a pas de démocratie ».
Sur la question des conflits intercommunautaires, le Premier ministre, explique également que c’est un concept que l’on « veut imposer à nos peuples. Nous n’avons pas de problème communautaire. C’est fabriqué ailleurs et des hommes sont instrumentalisés au nom de l’Islam tantôt, au nom des ethnies, ou autre, pour distraire nos peuples ». Pour Choguel K Maïga, les deux pays veulent se consacrer uniquement à la lutte pour la paix des populations, qui consiste à leur assurer la sécurité physique, alimentaire, éducationnelle, sanitaire.

Fédération
Sur le projet de fédération, les deux gouvernements ont décidé de travailler en profondeur sur cette question, avant la tenue de la Commission mixte. Pour Choguel Kokalla Maïga « toutes les grandes choses commencent par un rêve, par un homme ou un groupe d’hommes. Nos peuples ne veulent plus des frontières. Ce sont les mêmes populations, les mêmes villages, les mêmes familles ».
Cette fédération est bien loin d’être un simple discours rhétorique. Ce que les pères ont tenté et n’ont pas réussi, et il est du devoir de cette génération de le réussir. Et il faut aller vite au pas sans précipitation évidemment. Pour le Premier ministre Choguel Kokalla Maïga, il ne fait aucun doute que le Mali et le Burkina partagent un idéal commun.
« Le fédéralisme, visée ultime de nos autorités communes sera étudiée et fera l’objet de discussions à l’occasion de la prochaine commission mixte Mali-Burkina prévu à Bamako », a laissé entendre Choguel Maïga.
Même son de cloche de la part de son hôte burkinabé. Face à la volonté des peuples et de leurs dirigeants de réaliser l’intégration politique des Etats, plus de place à l’hésitation, les gouvernements du Mali et du Burkina travaillent déjà à baliser le chemin.
Quant à Me Apollinaire Joachim Kyélem Tambela il dira « une grande commission mixte va bientôt se réunir à Bamako pour baliser, renforcer la coopération et faire en sorte que les pas que nous posons puissent être plus au moins définitifs et qu’il n’y ait pas un retour en arrière. C’est ça notre objectif. Pendant le temps des Transitions au Mali et au Burkina Faso, nous fassions comprendre à nos peuples et au monde entier que désormais nous regardons dans la même direction. De sorte que, quel que soit les pouvoirs qui vont venir, qu’ils ne puissent pas défaire ce que nous avons posé comme jalons dans le sens de la rencontre entre les deux peuples. Pour être clair, nous sommes engagés dans la fédération de nos deux pays et nos chefs nous ont donnés des instructions, voilà pourquoi nous avons rencontré notre chef d’État pour faire part de la synthèse de nos travaux.»
Cette visite marque la volonté de nos plus hautes autorités de faire de l’Axe Bamako-Ouagadougou un modèle réussi d’intégration sous-régionale et de coopération Sud- Sud. Conformément aux conclusions de la réunion tripartite des ministres chargés des Affaires étrangères tenue les 8, 9 et 10 février 2023 à Ouagadougou, les deux Parties ont convenu d’approfondir la réflexion sur le projet de fédération.

Démocratie
C’est un gros pavé dans la marre de la France, chantre de la démocratie occidentale, pays affirmé des droits de l’homme, qui a longtemps bridé, pillé et humilié le Mali et le Burkina Faso et qui s’y voit chassée pour défaut de résultats dans la lutte contre le terrorisme par leurs autorités qui entendent se donner la main pour assumer leur souveraineté.
Selon Choguel Kokalla Maïga, «Nous avons décidé de ne plus être distraits, de nous consacrer sur la contradiction principale : lutter pour la paix des populations, leur donner la sécurité physique, alimentaire, éducationnelle, sanitaire et autres parce que sans sécurité, il n’y a pas de démocratie.
La démocratie vient après la sécurité. Nous n’avons pas voulu, le Mali et le Burkina Faso, faire comme dans d’autres pays où pendant 20 ans on a organisé des élections et puis un jour les partenaires ont décidé de partir et on voit les populations s’agripper aux trains d’atterrissages des avions pour quitter leur pays, les dirigeants étant partis avant ».
En phase avec leurs opinions nationales, les autorités des deux pays estiment en effet qu’il est question maintenant de laisser les discours aux politiciens et se mettre au travail afin d’aboutir à des réformes et orientations pouvant amener la paix, la cohésion, le progrès et le bonheur des peuples.
Le Mali et le Burkina ont été les pays de l’Afrique de l’ouest ayant été secoués par le plus grand nombre de coups d’État. Mais à quoi ont-ils servis ces changements anticonstitutionnels ? Où en sont les populations sur le plan de développement, la sécurité, l’indépendance, la souveraineté ?
Pour beaucoup, des deux côtés de la frontière, il faut à un moment que l’on se dise la vérité que la démocratie n’est pas un handicap mais plutôt les dirigeants qui ont passé le temps à créer des entorses à cette démocratie qui pouvait être bien ajustée au format et besoin de l’Africain. Que faire en matière de démocratisation après la sécurité ?

Culture
Choguel Kokalla Maïga et son hôte Me Apollinaire Kyèlem de Tambela ont donné le samedi 25 février 2023 le clap d’ouverture de la 28e édition du Festival panafricain du cinéma et de la télévision de Ouagadougou (FESPACO). Placée sous le thème « Cinémas d’Afrique et culture de la paix », cette édition se veut celle de la résilience.
C’est sous un standing-ovation que le Premier ministre Choguel Kokalla Maïga a tenu son discours d’une vingtaine de minutes. Insistant plusieurs fois sur les liens séculaires entre le Burkina Faso et le Mali, le chef du gouvernement de la transition martèlera qu’il est «heureux et fier d’être sur la terre libre du Burkina Faso ».
Selon lui, le choix du thème du FESPACO de cette année n’est pas fortuit. « Cette thématique est de nature à renforcer notre capacité de résilience forcée par nos valeurs ancestrales ». Ainsi, il a appelé les cinéastes à recréer les liens africains à partir des valeurs endogènes (…) Le Mali et le Burkina Faso sont deux pays frères » qui « sont confrontés aujourd’hui, comme vous le savez, à un défi sécuritaire. Notre combat pour la paix et la souveraineté demeure la priorité (…) Nos deux pays sont ensemble, au coude à coude, face à l’hydre terroriste », a ajouté Choguel Maïga. Dans ce contexte, la culture a un « rôle avant-gardiste à jouer dans le processus de paix», a-t-il fait valoir.

Maliens du Faso
Le Premier ministre, le Dr Choguel Kokalla Maïga et sa délégation ont rencontré ce samedi 25 février 2023, la communauté malienne établie au Burkina Faso. Il était notamment entouré de l’ambassadeur du Mali au Faso et du ministre des Maliens de l’extérieur, Alhamdou Ag Ilyène.
Les Maliens établis au Burkina ont exprimé leur attachement à la patrie et leur soutien à la transition. Ils ont toutefois exprimé quelques difficultés relatives à la carrière des fonctionnaires internationaux, et à leurs conditions de vie au Burkina. Les difficultés relatives à l’obtention des documents administratifs maliens et bien d’autres encore. Le Premier ministre épaulé par le ministre en charge des Maliens établis à l’extérieur a donné les informations contribuant à mieux faire comprendre les actions engagées dans le sens de la résolution des difficultés.
Le ministre des Maliens établis à l’extérieur et de l’intégration africaine a insisté durant les échanges sur les efforts en cours dans le cadre de la gestion des Maliens Établis à l’Extérieur, notamment l’adoption récente de la loi portant modification du Code des Personnes et de la Famille pour permettre la prise en charge des difficultés engendrées par le processus du RAVEC, la mise en circulation de la Carte d’identité biométrique sécurisée CEDEAO es efforts en cours pour la création du fonds d’appui à l’investissement productif de la diaspora, l’importance du décret portant sur le statut de Malien établi à l’extérieur et de migrant de retour adopté en septembre 2021 et évoqué les difficultés liés aux logements sociaux.
Le Premier ministre et sa délégation ont été agréablement surpris par l’existence d’un enfant baptisé Choguel par M. Adama Traoré son père de nationalité burkinabé.

La Rédaction

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